A l'occasion de la première édition du salon Santé Sport organisé par Clinic Médico Sport, Axomove a été invité sur le plateau de CMS TV pour parler de rééducation sur mesure. Pierre-Yves Carlier, fondateur d'Axomove, a présenté le projet et a échangé avec Patrick Berdoulet, consultant CMS TV et kinésithérapeute libéral.
Pierre-Yves Carlier : L'idée est née de ma rencontre avec Boris, qui est maintenant un de nos associés. Il était un de mes patients et est ancien handballeur professionnel, fortement blessé donc je l'ai vu beaucoup de fois au cabinet. A chaque fois, les sportifs veulent être rééduqués rapidement donc on doit aller un peu plus vite, on doit donner plus d'exercices qu'ils doivent essayer de faire plus régulièrement avec nous mais aussi à la maison entre deux séances.
Donc je lui donnais les exercices sur papier ou à l'oral et on a fait le constat qu'en fait on n'avait pas vraiment d'outils adaptés pour pouvoir donner ces exercices de rééducation correctement, suivre les patients afin de savoir s'ils étaient bien fait et puis, du côté patient, il n'y avait pas non plus d'outils pour pouvoir les lire et être suffisamment motivé pour pouvoir les faire correctement.
C'est de là que l'idée est partie et en fait on a fait un constat qui est fait par plein d'autres kinés : on a fait une étude qui a montré qu'il y avait près de 95% des kinés qui donnaient des exercices à faire à domicile et qu'il n'y avait que 35% des patients seulement qui les réalisaient, donc il y a quand même une grosse différence entre les deux. Il fallait donc un outil pour pouvoir augmenter un petit peu cette observance des exercices.
Patrick Berdoulet : Et bien, si c'est chez nous dans le sud-ouest, c'est en dessous des 35% parce que les méditerranéens, j'en parlais ce matin, ne seront pas tout à fait prêts à faire des exercices par eux-mêmes. Déjà dans le nord on est à 35%, nous, on est en dessous.
Alors c'est vrai que personnellement je donne toujours des exercices à faire à la maison parce que ce n'est pas une ou deux séances d'une heure au cabinet qui va permettre d'améliorer un état pathologique. Donc au départ on faisait des dessins sur un papier mais ce n'est pas toujours très clair, ensuite je me suis mis à filmer avec l'Iphone et essayer de transmettre les vidéos aux patients. Mais il y en a qui ne sont pas capables d'adopter ce type de pratique donc je crois que ce que tu as envisagé, Pierre-Yves, avec cette panoplie d'exercices va nous faciliter le travail parce qu'on n'a pas toujours du temps non plus à passer pour montrer et dire aux gens de faire leurs exercices, les détailler etc...
Là, ça me semble facile d'aller piocher des exercices et de vérifier s'ils ont été fait par les patients. C'est une auto-rééducation qui est absolument indispensable pour avoir un résultat satisfaisant avec un nombre de séances moindre. On a suffisamment de travail pour tourner sur moins de séances avec les patients et faire face à la demande de rééducation que nous avons.
Pierre Yves Carlier : Tout à fait, du coup c'est exactement le constat que nous avons. Mais l'auto-rééducation est des fois assez mal vue : on se dit que le patient va faire les choses seul, qu'il va mal faire... Là, le but, c'est d'avoir une rééducation vraiment guidée par le kiné, ce n'est pas du tout de laisser le patient faire sa rééducation tout seul, c'est exactement l'inverse.
Pierre-Yves Carlier : Pour le praticien, la rééducation sur mesure est à plusieurs niveaux. D'abord, c'est de pouvoir avoir accès à une grosse quantité de vidéos d'exercices parce que c'est comme ça que l'on transmet les prescriptions d'exercices. Donc là nous en allons bientôt en avoir un peu plus de 700, ce qui nous permet d'avoir un gros stock pour pouvoir faire quelque chose de bien adapté à son patient. C'est la première étape du sur mesure : choisir le bon exercice à donner.
D'ailleurs, comme il y a beaucoup d'exercices, il faut pouvoir les trouver facilement donc on a mis en place des filtres, soit par articulation, par type de travail, par muscle, la partie du corps que l'on veut travailler, ce que l'on veut faire etc... Ça permet de trouver rapidement parmi les 700 exercices celui que l'on veut.
Ensuite il faut paramétrer ces exercices pour qu'ils puissent être fait correctement. Nous, on permet de faire ça, on permet de dire exactement le nombre de mouvements qui doivent être fait, le temps de tenu d'un exercice, la récupération à la seconde près entre deux exercices ou à l’intérieur d'un exercice... On peut tout paramétrer.
Mais il faut que l'on aille plus loin dans le paramétrage pour être vraiment sur mesure : au lieu d'avoir juste ces paramètres à côté, ils sont directement intégrés dans la vidéo. C'est à dire, par exemple, que si vous avez demandé au patient de faire 10 squats, et bien dans la vidéo, le coach va faire 10 squats. Le coach de la vidéo va faire exactement le nombre de mouvements que le kiné vous a demandé de faire, le temps de travail en gainage, le temps qu'il faut tenir sur l'étirement etc... Tout ça va être mis sur une seule et même vidéo.
On a vraiment été au bout de la personnalisation, du programme de rééducation qu'on voulait donner aux patients pour avoir en vidéo ce que l'on veut que le patient fasse et qu'il n'ait plus qu'à se mettre devant son écran pour le faire.
Patrick Berdoulet : A une époque, on a vu les gens qui faisaient des cours de gym le matin avec deux filles en vidéo le dimanche matin et il y avait une population énorme qui faisait ce travail là. Et justement c'est parce cette population avait en vidéo l'exercice à réaliser. C'est beaucoup plus facile et beaucoup plus motivant avec ce système de vidéos de réaliser cette auto-rééducation, j'en suis convaincu.
Pierre-Yves Carlier : En fait, ce que l'on a vu au niveau du praticien, ça va se retranscrire sur ce que va vivre le patient. Le leitmotiv que l'on a vraiment, pour le praticien comme pour le patient, c'est la simplicité. Il faut que ce soit le plus simple possible, éliminer tous les freins que le patient puisse avoir pour ne pas réaliser sa rééducation.
Avec l'application, il sait exactement le temps dont il a besoin pour faire son programme : s'il a 12 minutes 30 devant lui, il sait qu'il va pouvoir le réaliser, il n'aura pas l'excuse de dire qu'il n'a pas le temps... Il va savoir aussi exactement ce qu'il faut faire puisqu'il a exactement ce qu'il doit faire sur son écran : côté gauche, côté droit ou le temps, le nombre de répétitions etc... Il aura également la liste du matériel dont il a besoin... Il pourra s'identifier au mannequin qui est dans la vidéo...
Avec tout ça, on enlève finalement tous les freins qui sont possibles pour le patient. Il n'a finalement qu'une seule vidéo à lancer : il se connecte sur son compte, il fait "play", il se met en face de l'écran et il n'a plus qu'à réaliser ce qu'il y voit. Cela lui permet de se concentrer vraiment sur la qualité du mouvement qu'il doit faire et n'a pas à compter le nombre de répétitions, d'avoir un chrono pour savoir le temps qu'il doit faire etc... Tout ça c'est fait, on lui a prémâché le travail, il n'a plus qu'à faire sa rééducation.
C'est ça la simplicité et la personnalisation qu'on a voulu dans Axomove pour le patient. (Découvrez le témoignage d'une patiente)
Pierre-Yves Carlier : On était convaincus de la pertinence d'un support vidéo mais du coup on a voulu pousser un petit peu pour être sûrs de nous. Nous avons donc réalisé une étude en partenariat avec le centre de rééducation L'Espoir dans le nord, que l'on remercie d'ailleurs parce que ça nous a été très utile. Hélène, qui fait partie de l'équipe Axomove et qui finissait alors son master de sciences cognitives a participé à la réalisation de cette étude.
Nous avons donc mené une étude pour savoir vraiment si la vidéo était plus motivante pour les patients par rapport à un support papier. Nous avons réalisé cette étude pilote sur 20 patients lombalgiques du centre de rééducation de L'Espoir. Nous avons eu des résultats vraiment intéressants sur le plaisir qu'ils ressentaient pendant leur rééducation, sur la motivation à continuer, à poursuivre, à reprendre la rééducation et à ne pas faire une séance et s'arrêter.
Nous avons eu aussi des surprises, c'est à dire qu'il a été montré que la rééducation sur support papier demandait une charge mentale plus importante aux patients. Il leur faut une plus grande concentration et c'est un frein de devoir se concentrer, savoir exactement ce qu'il faut faire...
Tout cela, nous l'avons chiffré et ça nous a conforté sur ce qu'on pensait être bon pour le patient.
Patrick Berdoulet : C'est sûr qu'avec un dessin c'est beaucoup plus difficile de corticaliser le mouvement et de le réaliser correctement donc le patient abandonne. S'il le fait d'une certaine façon et se dit "mince ça me fait mal", c'est peut être parce qu'il l'a mal fait ou qu'il a mal interprété le dessin, ou alors que le kiné n'a pas fait un dessin assez explicatif...
Avec la vidéo, il n'y a pas de problèmes. C'est un peu comme un coureur de 100 mètres : s'il s'entraîne le lundi et le mercredi et qu'il fait une compétition, il ne sera jamais bien entraîné que s'il fait ses entraînements le lundi mardi mercredi jeudi. Donc le patient c'est pareil : s'il fait de l'auto-rééducation, il va récupérer beaucoup plus vite et avec des exercices qui sont bien faits.
Pierre-Yves Carlier : Axomove est une application web, c'est à dire que l'on n'a pas besoin de la télécharger sur les stores, on a juste besoin d'un navigateur. Par contre, ce qui nous différencie d'un site web, c'est que l'application web va être parfaitement adaptée pour fonctionner sur un téléphone, sur un Ipad ou sur un écran d'ordinateur. Donc on a juste vraiment besoin de ce navigateur. On s'inscrit directement sur internet et on peut tout faire de là.
Sur comment ça s'inscrit dans la journée, je vais prendre mon exemple à moi : personnellement j'utilise sur ma tablette que je garde toujours avec moi et je fais mes programmes de rééducation en général pendant que le patient se rhabille. Comme ça c'est facile de trouver les exercices avec les mots clés et de les paramétrer. En général, en 3-4 minutes le programme est fait. Donc clairement je lui demande, si c'est un patient qui ne s'est pas encore inscrit, de noter son nom, son prénom, son adresse mail avant, il commence à se rhabiller et généralement quand il a terminé, j'ai fini de lui prescrire le programme. Je lui envoie et avant d'être sorti du cabinet, il a déjà la notification par mail de la création de son compte et de son programme qui est arrivé sur son téléphone.
Ça me permet à moi de ne pas perdre de temps en fin ou en début de journée ou le weekend à préparer des programmes de rééducation, je le fais quand il est là, principalement quand il se rhabille voire même quand il fait son exercice : si l'exercice convient, je le rajoute.
Moi je suis kiné en libéral, mais il y a aussi des centres de rééducation comme justement L'Espoir qui travaille avec nous : eux utilisent l'application avec l'écran (on fournit un écran tactile si besoin) sur le plateau technique. Les gens peuvent se connecter et travailler directement dessus entre les séances de rééducation en présence de leur kiné voire carrément en dehors des heures d'ouvertures des salles. On a souvent eu des remontées disant que les patients ne travaillaient pas du tout leurs exercices le weekend. Et bien avec Axomove, ils ont leurs exercices qu'ils font directement sur le plateau, et quand le plateau est fermé, ils peuvent faire leur programme dans leur chambre avec leur Ipad par exemple. Toujours dans la motivation de continuer la rééducation le plus possible et le plus simplement possible.
Pierre-Yves Carlier : Oui nous sommes commercialisés depuis peu, et on a beaucoup de gens qui l'ont testé (découvrez leur témoignage) avant que se soit commercialisé et on a énormément de gens qui sont encore en période d'essai puisqu'on propose une période d'essai de 15 jours gratuits.
On a le centre de rééducation L'Espoir qui l'utilise également et on a des retours très positifs là dessus.
Pierre-Yves Carlier : Non pas vraiment, on a vraiment de tout. On a des gens qui sont des geeks purs et qui ont l'habitude t'utiliser ça. Mais comme on a tout fait pour que ce soit le plus simple possible pour le professionnel comme pour le patient, on a des gens qui sont à l'inverse pas du tout informatique mais qui arrivent très bien à s'en servir.
On a aussi des étudiants qui l'utilisent, car on donne un accès gratuit à notre application pour les étudiants qui sont en IFMK pour qu'ils aient une source d'exemples d'exercices : je me souviens pendant mes études on me disait "il faut renforcer l'ischio-jambier"... mais on n'avait pas vraiment d'exercices qui collaient. J'ai fait une intervention à l'IFMKNF à Lille, où justement on se retrouvait avec des étudiants qui étaient un peu bloqués quand on leur demandait de proposer un protocole d'exercices. Donc on cherchait ensemble des exercices adaptés à la problématique du patient, ça permettait à l'étudiant de réfléchir avec un outil éducatif.
Donc on a vraiment de tout concernant les gens qui utilisent l'application. Même au delà des kinés, on a quelques podologues, quelques préparateurs physiques aussi... Je pense que c'est un outil qui est vraiment utilisable par tous.
Patrick Berdoulet : Je suis persuadé que c'est intéressant parce que je le vois quand je fais des topos et que je montre beaucoup d'exercices. J'en ai fait la semaine dernière à Grenoble sur l'épaule instable où je montrais beaucoup d'exercices. Les kinés me disent souvent qu'ils n'avaient pas pensé à faire ces exercices là et ils me demandent si je peux leur donner mon topo.
Ainsi, ils témoignent de leur intérêt d'avoir des exercices types parce que ça leur donne des idées pour leurs patients mais je crois que la finalité, c'est d'être interactif avec la vidéo pour le patient et la vision sur la vidéo de l'exercice qu'il doit réaliser. Il est face à quelque chose qui n'est pas un humain mais qui est une image qui lui permet justement de travailler.
Pierre-Yves Carlier : Tout à fait, en plus, vous parlez d'humain : on n'est pas sur une vidéo d'animation 3D, on est avec un humain qui a été filmé, ce qui permet de montrer toutes les difficultés d'un exercice contrairement à une animation 3D ou un dessin animé qui peuvent montrer des choses faciles alors que c'est difficile à réaliser.
Pierre-Yves Carlier : Alors pour l'instant, si je ne me trompe pas, on a 617 vidéos. On en a filmé encore 110 que je suis en train de paramétrer pour pouvoir les intégrer à l'application. Donc d'ici peu, on devrait avoir entre 700 et 750 vidéos disponibles avec des vidéos principalement sur de l'orthopédie et de la traumatologie mais on a aussi des vidéos de post-partum, adaptées femmes enceintes, de gériatrie mais aussi, grâce à notre partenariat avec le centre L'Espoir, des exercices adaptés à des personnes amputées pour qu'ils puissent travailler en autonomie, c'est quelque chose de très important pour eux.
Nous avons un panel de vidéos assez large et on commence à en avoir un nombre assez intéressant pour pouvoir choisir vraiment quelque chose qui correspond aux problématiques du patient.
Pierre-Yves Carlier : Quand on se lance dans une start-up comme ça, on a un peu envie de faire changer le monde ou de faire changer les professions, inciter les kinés à se mettre sur le devant de la scène et à redonner ces exercices là : il y a de plus en plus d'études qui montrent vraiment que les exercices de rééducation c'est le top du top au niveau du soin et que c'est souvent plus efficace que les médicaments, que c'est souvent plus efficace que plein de choses et donc le but c'est vraiment ça. C'est de se remettre en scène et d'aller vraiment montrer que l'on a des atouts à faire valoir sur la santé en général.
Patrick Berdoulet : Et on le voit bien dans le cadre de la sécurité sociale qui fait des films sur la lombalgie avec le mouvement, donc c'est très important que les gens fassent un auto-entretien dans les lombalgies et on aura des améliorations, on aura un coût moins cher pour la sécurité sociale et c'est vraiment l'avenir à mon avis de ce type de pratique.
Pierre-Yves Carlier : Alors on peut nous souhaiter de faire parti de l'avenir, ça sera déjà pas mal.