L’expérience de la douleur est caractérisée par de grandes différences entre les individus. Celle-ci est influencée par de multiples facteurs: âge, sexe, environnement, variables biologiques, état émotionnel ou encore le stress.. Tous ces facteurs interagissent les uns avec les autres pour influencer positivement ou négativement l’expérience de la douleur.
La prise en compte et la compréhension par l’individu qui souffre, de tous ces facteurs est donc d’une importance cruciale dans la prise en charge de sa douleur et dans sa guérison. [1]
Notre cerveau garde en mémoire l’expérience douloureuse
Tout au long de notre vie, nos expériences vécues en termes de douleur s’intègrent dans notre cerveau. Celui-ci met en mémoire ces expériences passées dans le but de se protéger face à une potentielle nouvelle atteinte douloureuse. Donc si vous avez fait une chute à ski sur une piste à bosses et que vous vous êtes cassé le bras, il est probable que votre cerveau s’en souvienne et que la prochaine fois que vous croiserez une bosse, vous allez certainement la contourner.
Ajouté à cela, les messages que nous lisons et entendons en permanence sur les réseaux sociaux, à la télévision... qui renforcent les croyances négatives liées à la douleur et favorisent le pessimisme et le catastrophisme (c’est une attitude mentale qui nous fait envisager le pire face à une situation et en retour ce catastrophisme nous sensibilise et augmente notre sensation douloureuse). [4 ,5, 6]
“Ne portez pas ce carton en vous penchant en avant, vous allez vous faire mal au dos!”, “Si tu continues à lire tes SMS comme ça tu vas avoir mal au cou” et bien d’autres fausses croyances que nous avons tous déjà entendu un jour.
Nos croyances influencent nos comportements
Les croyances sont nombreuses et influencent toutes de manière plus ou moins importante, l’expérience de la douleur ainsi que nos comportements face à celle-ci.
Nous retrouverons alors chez certains des comportements d’évitement (rappelez vous l’histoire de la piste à bosse), de la kinésiophobie (qui est la peur du mouvement, par exemple je me bloque le dos en voulant me tourner, j’aurai par la suite une certaine appréhension à refaire ce même mouvement de peur de redéclencher la douleur) ou encore le catastrophisme. Dans un premier temps ces comportements sont utiles pour se protéger mais lorsqu’ils persistent alors qu’il n’y a plus aucun danger pour le corps, cela devient alors problématique.
La peur de la douleur et/ou du mouvement peuvent alors augmenter notre sensibilité et amplifier le signal de douleur, l’alarme va se mettre à sonner plus tôt. Nous avons alors dépassé le stade où la douleur était utile et protectrice.
Nos croyances influencent notre douleur
Les croyances négatives que nous avons sur notre corps et nos douleurs jouent donc un rôle important dans les réponses comportementales et émotionnelles et favorisent les incapacités et le handicap. Lorsque nous avons des attentes négatives et que nous sommes persuadés que la douleur va s’aggraver, nous sécrétons plus de cholécystokinine, une substance qui facilite la transmission de la douleur. Donc plus nous aurons d’idées noires concernant notre douleur, plus celle-ci se transmettra rapidement et durablement. [2,3]
Si nous interprétons la douleur comme dangereuse et lui associons des pensées négatives, nous allons tout faire pour l’éviter et éviter les situations que nous pensons en lien avec le déclencheur de cette douleur.
Que pensez-vous de cette situation: “Je me suis fait mal au genou la dernière fois que j’ai pris l’escalier, alors c’est décidé, maintenant je prends l'ascenseur! En plus, je suis tellement fatiguée que je risque de rater une marche et de tomber!”
Dans cette situation, le cerveau associe l’escalier à la douleur au genou et pire encore, à la chute et au risque de se blesser gravement. Mais si nous réfléchissons bien à l’apparition de cette douleur au genou: était-ce parce que cela faisait 8h que je travaillais assis sans bouger et que mon collègue me harcelait de messages pour que je finisse le dossier en cours, qu’en rentrant chez moi j’ai voulu grimper l’escalier à toute vitesse et que je me suis fait mal. Ou parce cela fait des jours que je ne dors pas, que je manque de motivation au travail et que je n’ai même plus le goût au sport qu’en rentrant chez moi épuisée j’ai voulu prendre l’escalier et que la douleur au genou est apparue.
En réalité ce n’est pas l’escalier le problème, c’est l’association que nous en avons fait qui a favorisé l’apparition de notre douleur au genou. La solution n’est donc pas de prendre l'ascenseur tous les jours pour ne plus avoir mal, mais de comprendre pourquoi à ce moment précis j’ai déclenché cette douleur au genou.
A l’inverse, si nos pensées concernant notre douleur sont positives et que nous affrontons notre douleur plutôt que de la subir, nous avons plus de chances de guérir. [7, 8]
Le saviez-vous ?
Concernant la lombalgie, les études montrent que l’évitement et la peur sont pronostiques d’un mauvais rétablissement et d’un passage à la chronicité. Il a aussi été démontré que les facteurs psychosociaux de la catastrophisation de la douleur sont liés à la durée d’absentéisme et au handicap dans les troubles lombalgiques. [7, 9, 10 ,11, 12] Donc concrètement plus vous serez négatifs et aurez peur de vos douleurs plus vous serez gênés et plus votre arrêt de travail sera long.
Nous avons donc pu voir que de nombreux facteurs peuvent influencer notre expérience de la douleur et que nos croyances et nos comportements peuvent l’exacerber ou au contraire la diminuer. La compréhension de ces facteurs nous permet de mieux comprendre notre douleur et donc de limiter les fausses croyances afin d’adopter des comportements plus justes face à notre douleur.
Retenons que :
➡️La douleur est influencée par de nombreux facteurs: biologiques, physiologiques, environnementaux
➡️Le corps et le cerveau gardent en mémoire l’expérience douloureuse
➡️Nos croyances, positives ou négatives influent sur l’expérience douloureuse
➡️Comprendre les facteurs de déclenchements de la douleur permet de modifier nos comportements face à notre douleur
➡️Comprendre notre douleur nous aide à aller mieux
As tu tout retenu ?
Viens te tester
SOURCES :
[1] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5350021/
[2]https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S141335552030407X?via%3Dihub
[3]https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17873596/
[4]https://journals.lww.com/clinicalpain/Fulltext/2001/03000/Bias__Effects_in_Three_Common_Self_Report_Pain.8.aspx
[5] https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1521694209001570?via%3Dihub
[6] https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs12529-016-9600-9
[7] https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0242994
[8]https://journals.lww.com/pain/Fulltext/2016/08000/The_fear_avoidance_model_of_pain.5.aspx
[9] https://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S1529-9430(13)01576-3
[10] https://www.em-consulte.com/article/877702
[11] https://www.sjweh.fi/show_abstract.php?abstract_id=1360
[12] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6278039/
[13] https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4845348/
[14] https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1779012317304886