Le domaine du maintien à domicile utilisant les technologies de l’information et de la communication (TIC) est en progrès constant et encore plus avec les dernières mesures sanitaires. L’utilisation de ces nouvelles technologies a le potentiel d’améliorer l’accessibilité aux services de réadaptation et de rééducation pour de nombreux patients ayant une incapacité physique ou cognitive. Malgré leur usage naturel en France, les termes de rééducation et de réadaptation sont caractérisés par une instabilité sémantique chronique entraînant parfois des incompréhensions, faisons le point.
Les termes employés dans le domaine du soin sont différents et on ne s’y retrouve pas toujours au milieu de ce jargon. Pour décrire le parcours de soin d’un patient, nous retrouvons dans les services de médecine physique de réadaptation (MPR), la trilogie des “3R”: Rééducation, Réadaptation et Réinsertion. Ces termes se définissent de la manière suivante :
La rééducation s'adresse principalement à l’appareil locomoteur et désigne essentiellement les domaines de la kinésithérapie et l’ergothérapie. Par exemple, vous vous faites une entorse de cheville, vous allez donc avoir des séances de rééducation pour permettre à votre cheville de retrouver sa mobilité, sa force et sa stabilité. Dans ce cadre, si l’on parle de la rééducation fonctionnelle, celle-ci désigne les moyens à mettre en œuvre pour une réhabilitation de la fonction comme par exemple : faire marcher le patient comme avant.
Si l’on reprend l’exemple de l’entorse de cheville, le patient va d’abord faire des séances de rééducation, puis ensuite des exercices de rééducation fonctionnelle pour refaire fonctionner sa cheville durant ses activités de vie quotidienne comme la marche, la course, les montées d’escalier...
La réadaptation fonctionnelle s’entend comme les moyens d’adaptation à une situation nouvelle où la fonction antérieure est manifestement altérée et doit être suppléée par une autre approche comme par exemple : un patient va se servir du bras gauche lorsque le droit est paralysé.
Donc si l’on interprète ces définitions, la première activité de la rééducation a pour résultat de récupérer des fonctions temporairement perdues et la seconde, celle de réadaptation, vise à substituer des fonctions perdues par d’autres. Cette vision segmentée engendre donc une troisième activité, celle de la réinsertion.
La réinsertion désigne le versant social, familial et professionnel de la réadaptation de l’individu dans son environnement.
Par exemple, lorsque le patient sort de centre ou de clinique, il lui faudrait un temps pour se réapproprier son espace de vie, sans équipe médicale autour de lui.
Cette vision à 3 compartiments engendre un cloisonnement professionnel et une segmentation d’actions cliniques pourtant indissociables rendant la situation parfois floue pour la compréhension du parcours de soin.
Une autre vision plus globale conçoit la rééducation fonctionnelle et la réinsertion comme incluses dans une démarche de réadaptation. Cette vision permet de réduire les incompréhensions et de voir la réadaptation dans un sens plus large, la décrivant comme l’ensemble des mesures mises en œuvre pour réduire les séquelles et autonomiser le patient.
Le terme “réadaptation” est un mot récent datant d’après la première guerre mondiale. Ce sont les fondateurs de la médecine physique et de réadaptation (Howard Rusk, New York, André Grossiord à Garches) qui l’ont adopté pour dénommer une spécialité médico-sociale.
La réadaptation est donc un concept global qui se définit comme “l’ensemble des moyens médicaux, psychologiques et sociaux qui permettent à une personne, en situation de handicap ou menacée de l’être, du fait d’une ou plusieurs limitations fonctionnelles de mener une existence aussi autonome que possible”. Elle concerne souvent le domaine cardio respiratoire comme par exemple la réadaptation cardiaque ou pulmonaire.
En fait la réadaptation, c'est un peu comme une coquille d’oeuf, à l’intérieur il y a le blanc qui constitue la rééducation fonctionnelle et encore à l’intérieur on retrouve le jaune pour la réinsertion. Les trois entités fonctionnent ensemble pour composer l'œuf.
Au cours de ces dernières années, la littérature scientifique n’a cessé de publier des articles mentionnant les termes de telemedecine et telerehabilitation" ce qui traduit l’intérêt croissant pour la recherche dans ce domaine. En anglais, il n’existe qu’un seul et unique terme pour décrire les actions de téléréeducation et de téléréadaptation, c’est celui de” telerehabilitation”.
Dans les pays européens comme la France, le terme anglais “telerehabilitation” est traduit par “télérééducation”. Alors que dans un pays outre atlantique comme le Canada, ce mot est traduit par le terme de “téléréadaptation”. Attention aussi à ne pas traduire ce “faux ami” par téléréhabilitation qui n’est pas assez généraliste et ne décrirait pas précisément les activités de réadaptation et de rééducation.
Donc si l'on reprend les définitions précitées, on comprend que les activités de télérééducation concernent plutôt l’appareil locomoteur et le domaine de la kinésithérapie et de l’ergothérapie. Et que celles de téléréadaptation sont plus générales englobant les activités de rééducation fonctionnelle et de réinsertion dans le milieu social, familial et professionnel comme la téléréadaptation cardiaque après un AVC, ou la téléréadaptation post chirurgie...
Qu’il s’agisse de télérééducation ou de téléréadaptation, ces termes décrivent une séance de consultation à distance avec un thérapeute.
Par le biais d'un téléphone, d'un ordinateur ou encore d'une tablette, elle permet la discussion entre un patient et son professionnel de santé qui pourra: évaluer sa condition, faire un suivi de son évolution recommander les traitements adaptés à celle-ci et tout cela sans faire sortir le patient de son domicile.
La télérééducation et la téléréadaptation sont possibles lorsque le patient et le soignant sont capables d’utiliser efficacement le logiciel de téléconsultation et surtout lorsque le patient a les capacités cognitives et physiques de suivre un traitement à distance.
Ces pratiques existent depuis longtemps dans les pays anglosaxon et elles se sont fortement développées en France depuis ces 12 derniers mois. Les séances de télérééducation et de téléréadaptation sont fondamentales dans l’autonomisation du patient et la gestion de ses symptômes et devraient être accessibles à toutes les personnes qui en ont besoin. Que l’on parle de télérééducation ou de téléréadaptation, le plus important est d’avoir un langage commun et d’accorder la même signification aux mots employés. Dans ce cadre, nous parlons avant tout de la prise en charge virtuelle d’une personne par un professionnel de santé afin de procéder à l’évaluation fiable de sa condition et de discuter d’un plan de traitement efficace.
SOURCES
[1] https://www.cochrane.org/fr/CD013040/AIRWAYS_comment-lutilisation-de-la-technologie-pour-la-readaptation-pulmonaire-rp-se-compare-t-elle-la-rp-en
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1877065711002776?via%3Dihub
https://core.ac.uk/download/pdf/82081092.pdf